Débourrage de Spotlight

Spotlight. Il était arrivé plus tôt dans la matinée. Le bel Irish Cob pie noir allait tout doucement vers sa taille d'adulte, et il était descendu du van comme une furie. Puissant et racé, il était d'une fierté sans pareil. La tête redressée, il caracolait au bout du licol. Je décidai alors de mélanger les étapes. C'était cela le principal dans ce métier : s'adapter. Je le fis entrer dans le rond et enlevai le licol. Le beau poulain s'ébroua et s'élança, ses fanons salis par le crottin du van. Il jeta son feu, je le laissai faire. Pendant ce temps, je courus chercher une longue rêne à la sellerie. Lorsque j'entrai dans le rond, il baissa les oreilles. Mais avant qu'il ait pu aller plus loin, je lançai la longue rêne dans sa direction, et bondit sur la côté, prit au dépourvu. Je le chassai ainsi pendant dix longues minutes, et cela meparut si long que j'en vins à douter du bien fondé de mon acte. Mais dès qu'il oublia qu'il était un jeune étalon plein de fougue, le premier signe apparut et me soulagea : il braqua son oreille intérieure sur moi. Je le fis changer de main, mais son oreille restait sur moi. Au bout de cinq autres minutes, il lécha et mâchouilla. Je me tournai alors de manière à ne pas le regarder. Les minutes passèrent, et je m'autorisai à regarder discrètement. Il attendait, oreilles plaquées. Aussitôt, je recommençai à la chasser avec la longue rêne. Le manège recommença mais dure moins de temps. Je me tournai donc de nouveau. Et quelques minutes après, je sentis le bout de son nez contre mon épaule. l ronflait doucement, et me suivit docilement. Je me retournai alors et lui caressai le chanfrein.

- C'est mieux comme ça, tu ne crois pas ?

Une fois passée cette impression de fierté qui émanait de lui, il était à couper le souffle. d'une présence incroyable, il était magnifique et son regard était d'une intensité rare. Je lui passai le licol, et caressai lentement toutes les parties vulnérables de son corps. Je lui soulevai enfin chaque pied, puis le félicitai.
Je lui remis le licol et l'emmenai vers l'écurie. je le laissai découvrir à sa guise. Après un petit tour en main dans la propriété, je vérifiai ses pieds et le lâchai au pré.

L'après-midi était déjà bien entamée lorsque j'arrivai au pré, licol de corde en main. Spotlight releva la tête, me scrutant avec un mélange de mépris et de curiosité. J'aurais donné ma main à couper qu'il s'imaginait déjà me traînant dans le pré pendant trois heures. Erreur, mon grand. J'entrai dans le pré, et il resta immobile. Mais au lieu d'aller vers lui d'un pas franc, je m'assis dans l'herbe à l'entrée, et attendit, sas le regarder. Je jouai avec la corde, sifflotant; modèle d'indifférence. Il ne fallut pas deux minutes au fier adolescent pour me rejoindre et me donner un petit coup de tête amical. je le caressai et le félicitai, puis lui présentai le licol. Il hésita, puis plongea la tête dedans. Je le liai et lui offrit un bonbon.

- Tu vois quand tu veux !

Il ronfla doucement et je l'entraînai vers les écuries. Mais de nouveau, au lieu de l'attacher comme il s'y attendait, je posai simplement le corde sur son garrot et lui tournai le dos pour ouvrir ma boîte de pansage. La porte était fermée, bin entendu, mais il aurait pu s'enfuir. Il fit un pas, hésitant, partagé entre l'envie de profiter de cette liberté, et celle de rester sagement là pour recevoir des félicitations. Il opta finalement pour le deuxième choix, sans doute un peu à contre coeur. Je commençai à le brosser. Etrille, brosse dure, brosse douce... Lorsque je l'eus brossé complètement, je descendit lentement ma main le long de son antérieur et exerçai une pression dur le sabot.

- Pied, mon grand, pied.

Il renacla, mécontent, et souleva violemment son sabot. La claque tomba sur son épaule, accompagnée d'un NON ferme, sans crier. Il fit un pas de côté, surpris par cette punition. Je refis une tentative, mais son sabot resta cloué au sol. j'insistai, et il souleva finalement son pied. Je le félicitai, et le reposai aussitôt. Je répétai plusieurs fois l'opération, et il s'améliorait. Il me fit le même scénario pour les postérieurs, et j'adoptai le même comportement. Finalement, ses pieds curés, je l'emmenai vers la douche. il se figea à l'entrée, inquiet et incertain, mais je le laissai entrer à son aise. Je le fis ressortir et rentrer de nouveau plusieurs fois, et l'aisance venait avec les répétitions. Je le gardai donc en main, et allumai le douche. il ronfla et fit de grands yeux, puis baissa la tête pour sentir cet objet étrange. Doucement je commençai à mouiller les fanons. Il n'était pas à son aise, mais il restait curieux. je le félicitai chaleureusement, et le douchai entièrement. Puis, je le savonnai avec conviction, shampouinai les crins et les fanons, et rinçai le tout. Enfin, je l'attachai sous le solarium pour le laisser sécher, pendant que je rangeais l'écurie.
Lorsqu'il fut presque sec, je lui enfilai une couverture séchante pour achever le tout et le fit entrer dans son box. Etant donné qu'il était seul dans l'écurie des jument suitées, je l'avais mis dans l'écurie normale, en face d'Elixir. L'arabe coucha les oreilles et tenta une morsure, mais il se reçu un petit coup dans le nez.

- Pas de ça avec moi, d'accord ?

Par précaution, je refermai sa porte, alors qu'à l'habitude je la laissai ouverte avec une chaine enrobée de caoutchouc pour l'empêcher de sortir. Mais au moment d'entrer dans le box, Spotlight tenta de me bousculer. je tirai un coup sec sur la longe et il releva le nez. je le fis sortir, puis nous entrâmes de nouveau. cette fois-ci il resta sagement derrière. Je répétai l'opération et il restait respectueux. Cheval intelligent.

J'entrai dans l'écurie de bon matin, ce jour-là. Nous avions beaucoup de travail, et la journée serait intense pour le jeune trois ans qui tapait dans son box. Les rations étaient déjà distribuées, Elixir toisait l'Irish d'un oeil mauvais.

- T'es trop jaloux, mon grand...

Lunatic ronfla, sa jolie tête brune sortant de son box. Je lui donnai une caresse amicale, puis sortit Spotlight de son box. Je le débarrassai de sa chemise séchante, et le brossai rapidement. Je brossai mes crins, la queue et les fanons, et après un pansage dans les règles, je le sortis de l'écurie dans le calme. Le rond de longe était ouvert, et je l'y lâchai. Puis, je retournai à la sellerie pour me munir de deux rênes légères, de la selle, du tapis, du mouton, du filet. Je posai le tout en dehors du rond, puis y entrai, une rêne légère en main. Et je répétai le join-up. Il le refit rapidement et sans problème, ayant visiblement compris la leçon de la dernière fois. Ceci fait, je déposai au centre du rond tout le harnachement. Spotlight s'en approcha, curieux et intéressé. Pourtant, quelque chose me disait que cette étape serait plus difficile que le reste. En effet, j'avais noté chez lui un égoïsme certain. Il n'était pas méchant, loin de là, mais il pensait d'abord à lui. Lorsqu'il revint vers moi calmement, je lui enfilai un licol Winner, pour éviter qu'il ne se blesse avec la corde, auquel j'accrochai la longe de travail et l'alliance de longe. Je commençai donc tout doucement à poser le tapis sur la dos de l'étalon. Il ne bougea pas d'un sabot. Je posai ensuite très doucement la selle. Il fit un pas de côté. J'otai le tout, et recommençai un join-up. Puis, je réalisai à nouveau l'opération. Cette fois, il reste immobile. Je serrai alors très progressivement la sangle.

- Super, mon chou ! Continue !

je le caressai et lui offrit une friandise. Puis je fis bouger un peu le rouleau de longe qui me restait en main et il se mit calmement au pas. Puis soudain, il décocha un coup de cul superbe, et partit sur tout le rond en ronflant comme un buffle. Je le laissai faire, tout en restant rassurante. Je le fis changer de main, d'allure, mais rien n'y faisait. il se battait comme un fou furieux contre cette selle. Au bout de deux tours, il se calma brutalement, et partit au petit galop, puis au trot, puis au pas. Je le fis de nouveau changer de sens, et il obéit au doigt et à l'oeil. Je ne savais si je devais prendre cette réaction comme un bien ou un mal. Mais il avait réalisé les exercices, et je ne pouvais que le féliciter. Lui faire accepter le mor se révéla très simple, bien qu'il ne sembla apprécier que moyennement ce morceau de métal dans sa bouche. j'accrochai l'alliance, reliée à la longe, aux deux extrémités du mors, et le fit travailler. Il suait et ronflait, mais il était concentré. Je décidai toutefois d'arrêter là le processus. Je le rentrai calmement à l'écurie, où je le débarrassai de son matériel. je le bouchonnai et lui plaçai une couverture séchante, puis le laissai dans son box.

Spotlight passa la tête par l'entrée de son box et hennit à mon arrivée. Elixir tapa en renâclant, jaloux sans doute... Quoiqu'en y regardant bien, je remarquai une certaine nervosité chez les trois étalons... je m'approchai du box de ma petite jument arabe fraichement acquise.

- Alala, fille, c'est pas le moment !

Mademoiselle avait décidé d'être en chaleur. Je pris le licol Winner de la belle, lui enfilai une couverture de paddock, et la sortit au pré. En revenant aux écuries, je retrouvai trois étalons à fleur de peau, mais déjà un peu calmés. Tsss, les mâles... j'entrai dans le box de Spotlight, lui enfilai son licol, et le fit sortir. Mais au moment de sortir, il me bouscula violemment. Ignorant la douleur dans mon bras droit, je tirai un bon coup sur la longe. L'étalon releva la tête, les yeux blancs.

- NON.

Il dansait sur place, les yeux effarés.

- NON.

Il se calma finalement, sans doute lassé de jouer les sires effrayés. Je l'attachai, le débarrassai de sa couverture et le pansai rapidement. je le sellai, le bridai. Il ne fit aucun problème, mais n'y mit pas non plus de bonne volonté. Je l'emmenai vers la rond de longe, où je le fis travailler un peu. Puis, je plaçai sur son dos un sac rempli de sable, et marchai à côté de lui. Je fixai le sac sur la selle, et le fit trotter. Puis, je l'arrêtai au centre, enfilai ma bombe, et mit un pied à l'étrier. Je me contentai d'abord de mettre tout mon poids sur l'étrier. puis je me couchai sur la selle. Enfin, je passai ma jambe droite et me retrouvai en selle. Je le fis marcher, trotter, et je poussai même jusqu'au petit galop. Il avait une locomotion formidable.

- Là, c'est bien mon grand.

Je plaça la dernière bande verte, puis posai le tapis, l'amortisseur, la selle. Je lui enfilai le bridon, me munis de ma bombe et mon stick, et l'emmenai vers la carrière couverte. Journée chargée en perspective. Une fois dans la carrière, je l'arrêtai au centre, resanglai, et me mit en selle. Il était nettement plus grand que mes trois autres chevaux. J'exercai une légère pression sur ses flancs. Il bondit en avant, puis s'arrêta brutalement.
Et le reste de la journée se déroula ainsi. Au fur et à mesure, les gestes s'affinaient, les réactions s'amélioraient. En fin de matinée, je descendis, le félicitai, et le rentrai à l'écurie. Je le pansai, lui enfilai une couverture de paddock et le lâchai au pré.

Début de matinée, je lui plaçai des bandes, le harnachai, et l'emmenai dans la carrière. je travaillai sur les allures, la rêne d'ouverture, l'aide globale. Il répondait à merveille et cherchait vraiment à s'améliorer. Au bout d'une heure, je sentis qu'il n'y était plus, qu'il en avait marre. Je le rentrai, le débarrassai et le laissai en paix.

En début d'après-midi, je revins, lui posai des guêtres, le harnachai, et l'emmenai dans la carrière couverte. Là, j'avais installé des barres au sol, et quelques cavaletti, croix et droit, et même un oxer dans un coin oublié. Sait-on jamais. Je travaillai la foulée, le passage des barres au sol aux trois allures. Il bloqua quelques fois, mais je lui laissai toujours le temps. Finalement, il sautait sans problème de petits cavaletti.